« Les travailleurs sociaux doivent-ils intervenir sur les réseaux sociaux ? » (p.14-15)
« Agir en homme de pensée et penser en homme d’action. A l’image de cette maxime de Bergson, des professionnels se confrontent au remue-méninges qui leur est proposé, se risquant à déconstruire, à concevoir et à faire réfléchir.
[…]
Nécessaire adaptation ou résistance ? Atouts ou entraves ? Innovation ou effets de mode ? Il est vrai que l’on peut poser comme préalables des conditions et des garanties de maîtrise… Mais peut-on vraiment tenir à distance cette incontournable toile ? »
Au centre de cette toile (web, en anglais), la majeure partie des interactions numériques chez les jeunes générations est régie par les réseaux sociaux. Leur émergence, au milieu des années 2000 (Facebook est lancé en 2004, Twitter en 2006), a signé l’avènement du web 2.0.
Ce premier article, tiré du n°1335 du périodique Lien Social de la seconde quinzaine de mars 2023, expose un cadre de réflexion tracé par et pour les professionnel.le.s du travail social. Au centre de ce cadre, cette question : Accompagner les usages du web chez les jeunes est-il devenu un devoir pour les éducateurs spécialisés ?
« Vers une prévention spécialisée 2.0 ? » (p.16-17)
« Commandée en 2018 par la Commission de prévention des conduites à risque et les huit associations de prévention spécialisée du département de Seine-Saint-Denis, et dirigée par le Professeur des Universités Benjamin Moignard, les résultats de la recherche ont été restitués en 2021. »
Au centre du deuxième article qui nous intéresse dans le n°1335 de Lien Social, l’étude intitulée L’éducation spécialisée 2.0. Quels enjeux pour quelles pratiques ?, bien que géographiquement restreinte, défriche suffisamment le sujet pour esquisser une vue d’ensemble et relativiser un peu :
« Ce bref tour d’horizon ne doit pas nous faire perdre de vue que l’activité quotidienne de ces jeunes est résolument tournée vers des pratiques ordinaires de socialisation et de communication qui se déroulent sans heurts. Mais ainsi que nous l’avons évoqué, un certain nombre de points de vigilances doivent être fixés, par ailleurs bien identifiés par des organisations qui cherchent à mieux apprendre et accompagner les pratiques juvéniles – les promeneurs du net par exemple. Reste que le discours relativement alarmiste des éducateurs sur des pratiques numériques désordonnées ou anomiques nous semble relever plutôt d’une rupture générationnelle que d’une perception objectivée et renseignée de ces pratiques. Nos observations, dont il faut rappeler qu’elles ne visent qu’à fixer quelques repères, mais ne peuvent pas être considérées comme le résultat d’une recherche dédiée sur ce thème, recoupent les constats faits par ailleurs […]
Les réseaux sociaux sont un moyen de prolonger, de développer et de transformer des formes d’échange et de sociabilité qui leur préexistaient«
« Passaj C’net : comment ouvrir la prévention spécialisée au numérique ? » (p.26-27)
« Les réseaux sociaux font partie aujourd’hui de la vie des jeunes. Nous ne pouvons pas les éviter, sinon cela voudrait dire qu’on les laisserait dans un espace virtuel dans lequel on s’interdit de rentrer. »
Ce troisième article du n°1335 de Lien Social met en lumière le retour d’expérience des équipes de prévention de l’association PASSAJ, pour lesquelles les confinements de ces dernières années ont joué un rôle de catalyseur dans la mise en place de pratiques professionnelles autour des usages d’internet. Les réflexions personnelle et professionnelle quant à l’usage des réseaux sociaux, le besoin de formation, la nécessaire adaptation, la règlementation sont autant de jalons par lesquels les travailleurs sociaux ont commencé à cheminer dès 2020, avec à la clé de belles évolutions :
« Le lien avec les familles s’est renforcé, grâce à la création d’opportunités d’information les concernant diffusées à leur intention directement via les réseaux sociaux, engendrant des rencontres physiques en fonction des besoins et toujours en lien avec leurs enfants. Nos messages de prévention ont été consolidés à une échelle plus large, public et partenaires confondus. Enfin, notre maillage territorial a été consolidé par la visibilité des actions, services et missions répondant aux besoins du public. »
« Prolonger son action éducative sur internet : un travail au long cours » (p.28-29)
« Devenir Promeneur est une tâche minutieuse cumulant une multitude d’ajustements et de savoir-faire ».
Ce témoignage est une ode aux Promeneurs du Net, dont les missions s’inscrivent dans la droite lignée des réflexions, étude et retours d’expériences décrits dans les précédents articles. On comprend à la lecture du n°1335 de Lien Social que l’incontournable influence d’internet dans les relations sociales que les jeunes d’aujourd’hui tissent autour d’eux a bousculé bien des pratiques au sein de la grande famille des travailleurs sociaux, au moins sur la forme. Utiliser le numérique comme outil de médiation avec des jeunes qui sont nés en même temps que les smartphones n’est pas chose aisée, a fortiori lorsqu’on vient soi-même du monde d’avant le grand chambardement numérique. Mais « les travailleurs sociaux ont toujours su faire preuve d’un sens de l’initiative, de la créativité et de l’imagination face à leur quotidien », et ils en font la brillante démonstration une nouvelle fois en parvenant à se réorganiser et intégrer le web 2.0 dans leurs pratiques.
« En conclusion, retenons que les professionnels qui […] assurent une présence éducative en ligne, méritent tous nos applaudissements pour leur engagement et leurs efforts. Parce que chacun d’eux, à son niveau, en revisitant sa pratique, contribue activement à déployer des offres éducatives 2.0, répondant aux attentes de la jeunesse d’aujourd’hui et de demain. »